Victoire Barbedette avait perdu son premier mari Augustin Friteau avec trois petites filles en 1856 lors d'une épidémie de typhoïde. Restée seule avec son fils Auguste, elle s'était remariée en 1857 avec César Barbedette dit « Bériot ». De ce mariage vont naître deux garçons.
Eugène est né à Pontmain le 4 novembre 1858. Très tôt, il fut, comme son frère, initié à la prière. N'oublions pas qu'à Pontmain, on priait le chapelet tous les jours dans toutes les familles et cela depuis l'arrivée de l'abbé Michel Guérin. Le travail manuel faisait aussi partie du quotidien.
« Aussitôt sortis de l'école, toutes sortes de petits travaux nous attendaient à la maison. Il fallait tourner le rouet de la mère et de la domestique, effilocher les vieux chiffons de laine, piler les ajoncs dans la grange, couper en tranches les betteraves et les carottes pour la nourriture des animaux. Je me souviens que ce travail était assez dur... Il n'y avait donc jamais pour nous un instant de paresse » (mots d'Eugène).
Le matin du 17 janvier 1871, après le travail avec le père, il fallait bien remplacer le frère aîné Auguste parti à la guerre ; il était allé à l'église prier et servir la messe avant d'aller à l'école. Le soir, il se retrouvait à la grange pour le travail quand sorti dehors « voir le temps» il vit le premier la belle Dame.
Joseph est né le 20 novembre 1860. Il était d'un caractère plus enjoué que son frère, plus jovial. Lui aussi comme son frère avait été formé par Victoire à la prière et au travail. L'éducation « selon Victoire » était celle que l'on retrouvait dans toutes les familles de l'époque. C'était la mère qui était investie de la charge de l'éducation. Non point que le père s'en désintéressât, mais il était pris par le travail des champs, tandis que la mère se tenait à la maison ; il n'intervient qu'en dernier ressort pour les cas jugés graves par la mère : « Je vais le dire à ton père ».
La sanction était la plupart du temps une « tok » ; les gifles c'étaient pour les plus petits rebelles de la ville. A la campagne, on donne une « tok ». Le mot exprime parfaitement ce qu'il représente. C'était le bruit que le geste produisait sur la joue du récalcitrant. Victoire, disait-on, avait la « tok » facile, et c'était musclé.
Joseph avait donc dormi à la grange avec Eugène comme ils étaient habitués à le faire. Réveillés de bonne heure par leur père, ils avaient travaillé, puis mangé la soupe du matin avant d'aller à l'église où ils vont faire la grande prière du matin, puis le chemin de croix (c'était une promesse faite à Auguste pour qu'il revienne sain et sauf de la guerre) avant de servir la messe.
« Oh ! La belle Dame ! Qu'elle est belle ! ». C'est par cette exclamation que Joseph sorti de la grange un peu après son frère va saluer l'apparition.
Jeanne-Marie est née à Gosné (Ille-et-Vilaine) au village de Louvel le 12 septembre 1861. Elle était la fille unique de François Lebossé et de Jeanne-Marie Garancher. Dès le lendemain de sa naissance, elle avait été baptisée à l'église de Gosné par l'abbé Beaulieu, recteur.
Elle écrira plus tard : « Depuis l'âge de deux ans, à la mort de mon père, ma mère étant tombée paralysée, j'ai été recueillie par ma tante Supérieure des Sœurs Adoratrices de la Justice de Dieu, qui tenaient l'école à Pontmain » (12 décembre 1920).
Voilà donc Jeanne-Marie arrivée très tôt à Pontmain près de la tante Perrine Lebossé, en religion Sœur Marie-Timothée de la Croix née elle-même à Laignelet (Ille-et-Vilaine). Directrice de l'école, elle donne aussi des soins à domicile.
Pour Jeanne-Marie, la mort de son père et la maladie de sa mère qui entraînent la séparation sont sans nul doute une épreuve terrible qui la marque dès sa plus tendre enfance et que l'affection de la tante religieuse - malgré tous ses efforts - ne pourra compenser.
Se trouvant sur place, Jeanne-Marie va entrer très tôt à l'école, ce que dénoterait son esprit éveillé.
Le soir du 17 janvier, elle va suivre Sœur Vitaline avec les deux autres pensionnaires et elle va être témoin de tout ce qui se passe ce soir-là au-dessus de la maison d'Augustin Guidecoq.
On sait peu de choses de l'enfance de Françoise Richer. Elle était née en 1860.
Pensionnaire à l'école de Pontmain, elle vit là avec les religieuses : Sœur Marie-Timothée, Sœur Vitaline et Sœur Marie-Edouard et deux autres petites pensionnaires : Augustine Mouton, âgée de 13 ans, et Jeanne-Marie Lebossé (9 ans).
Une première fois, Victoire Barbedette était venue demander à Sœur Vitaline (Sœur Marie-Timothée était ce soir-là à sa communauté de Rillé Fougères) : « Ma Sœur, voudriez-vous venir chez nous ? Les garçons disent qu'ils voient quelque chose, mais nous on ne voit rien ».
Sœur Vitaline ne vit rien non plus, à l'exception des trois étoiles, mais fit cette réflexion judicieuse : « Si ce sont les enfants qui voient, c'est qu'ils en sont plus dignes que nous ».
De retour à l'école, Sœur Vitaline dira aux petites filles : « Petites filles, venez donc par là, Victoire a quelque chose à vous montrer ».
Les enfants hésitent. Françoise a peur de la nuit. Pourtant, c'est elle qui va voir la première. Arrivée au coin de la maison du cordonnier Rousseau, elle s'écrie : « Moi je vois bien quelque chose sur la maison Guidecoq, mais je ne sais pas ce que c'est ».
Elle fait les quelques pas qui la séparent de la grange avant d'écrier en même temps que Jeanne-Marie : « Oh ! la belle Dame » ! »
Françoise et Jeanne-Marie décrivent alors cette belle Dame, tout comme les garçons l'avaient déjà fait auparavant.
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